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Je suis sure que parfois
mes choix sont influencés par la volonté de casser mon
image. Je ne veux pas être étranglée. Je me méfie
beaucoup de mon image : elle n'est pas ma meilleure amie. |
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Je ne me classe nulle
part. Je ne me regarde pas vivre. Je ne me juge pas, je vis tout court.
Je n'essaie pas de m'imaginer par les yeux des autres, je ne m'occupe
pas de moi-même sous cet angle-là. |
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Je sais dans quelle catégorie d'actrices
j'entre pour le public, j'en souffre parfois ; être jolie femme,
même si c'est agréable, c'est un peu superficiel. Mais
je le comprends. |
Catherine Deneuve, article "Catherine
Deneuve ou les charmes de l'ambiguïté"
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Mon visage classique a marqué le public,
et m'a servie sur la distance. Mais combien de fois ai-je été
traitée de "jolie, blonde et froide". Je l'ai tellement
entendu que je ne l'entends même plus. Puis, mon visage m'a
bloquée. J'aurais adoré interpréter : "L'Honneur
perdu de Katharina Blum". Impossible, je n'aurais pas été
crédible.
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Froide, glacée,
le feu sous la glace (rires). On finit par s'y habituer. A la limite,
je crois qu'on n'y penserait plus tellement si certains journalistes
ne le rappelaient pas de temps en temps. Je crois que cette image
s'estompe car comme j'apparais un peu plus souvent à la télévision,
cela crée un contact plus chaleureux que les interviews écrites.
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Cette image me vient des couvertures des magazines,
des photos, qui sont évidemment des images arrêtées
pour toujours. Et je crois qu'autant mon physique m'a servi, me sert,
autant il a pu, peut, me desservir. En fait, beaucoup de gens croient
me connaître sans avoir vu mes films. Ceux-là ont acheté
des journaux dans lesquels ils m'ont vue : ils savent que j'ai deux
enfants, et plein d'autres choses sur moi, souvent très superficielles...
mais enfin, ils savent des choses à mon sujet. Mais ils n'ont
pas vu mes films... Ou alors peut-être arrive-t-il un moment
où il faut admettre que le physique est plus fort que tout
! Comme lorsque parfois des gens essaient de vous convaincre de quelque
chose, et vous, vous avez votre idée dans la tête, et
quoiqu'on vous dise, il n'y a rien à faire, vous n'en changerez
pas ! [...] C'est vrai que le danger, pour les acteurs connus, est
que le public a besoin de les fixer dans son imagination. Etre une
"vedette", c'est "représenter" quelque
chose, c'est sûr. Et on a beau savoir que l'on va voir cette
personne dans un rôle différent, vivre une vie différente,
il demeure toujours une certaine continuité... C'est évidemment
beaucoup plus subtil que cela, mais je crois en effet que, malgré
les contextes différents à l'écran, quelque chose
de votre personnalité finit toujours par ressortir. |
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C'est vrai que j'ai préservé
une image, une image qui n'est pas tout à fait moi, je le reconnais,
mais c'est l'image que j'ai envie de donner. Dans la vie, c'est pareil,
on a toujours envie de donner une image de soi qui correspond à
ce que l'on voudrait être, même si on n'y parvient pas
toujours. Mais pour une actrice, c'est presque un devoir de correspondre
à l'image que les gens ont de vous. Parfois c'est un peu lourd,
on a envie d'envoyer tout balader mais en même temps ça
oblige à une certaine tenue et la tenue c'est une chose importante
dans la vie. |
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C'est vrai que je n'ai pas envie de donner une
image différente de celle que les gens imaginent, ni une image
fausse. De toute façon, de caractère, et dans la vie,
je suis quelqu'un de très réservé. Je n'aime
pas l'idée d'une image morcelée. Je n'aime pas l'idée
des impressions, des jugements sur les impressions. Mais je ne maîtrise
pas très bien tout ça. |
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Contrairement à
ce que pensent beaucoup de gens, malgré une allure bourgeoise,
ma coiffure et ma façon de m'habiller, personne ne peut prouver
que je mène une vie bourgeoise. On me connaît vraiment
très mal. Mais j'ai une image qui m'arrange. |
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J'ai du mal à comprendre comment, après
toutes ces années, les gens ont de moi une image figée...
En vérité, j'ai l'impression qu'ils ne s'intéressent
pas assez à mon travail, ne regardent pas en détail
ce que j'ai fait. Quand je repense à mes films, je crois qu'il
y a une image physique de moi qui ressort et qui est plus forte que
tout : plus forte que "Belle de jour", plus forte que "Répulsion",
plus forte que "Tristana"... Mince, ce sont quand même
des films avec des personnages assez décalés, assez
tordus ! Mais on oublie ces rôles et on ne retient que la blonde
glacée. Je crois aussi que ce qui reste dans l'inconscient
collectif n'est pas mon image dans les films, mais plutôt mon
image-papier : les interviews, les couvertures de magazines, l'actrice
qui parle de ses films. Finalement, les acteurs devraient faire les
films, puis disparaître. Mon image est certainement plus sophistiquée
que moi. |
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La somme des choses est
une addition qui se fait tous les jours, sans calcul. Mais c'est vrai
qu'il y a une image qui se dessine. C'est pourquoi je me demande toujours
pourquoi il faut faire des interviews des acteurs. Il n'y a qu'à
regarder ce qu'ils font dans les films ! Au bout d'un moment, quand
on connaît leurs films, on peut écrire sur eux parce
qu'on a le droit de rêver, d'interpréter par rapport
à la manière dont ils jouent, leur façon de bouger,
ainsi que leurs choix et aussi ceux qu'ils n'ont pas faits. Autant
ce que l'on fait que ce que l'on ne fait pas dit quelque chose d'un
acteur, et donc d'une personnalité. |
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Mon image émane
aussi de l'idée que se font les gens d'après une interview,
justement. Et là, cela ne dépend pas que de l'interviewé,
sinon ce serait toujours sur la même ligne : il y a le journaliste,
le choix des questions et de la coupe. Moi, je suis assez fataliste,
même si je râle souvent... |
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Les gens oublient très
vite, comme si, au bout de trois ou quatre films, tout s'effaçait
et ne subsistait plus qu'une vision mélangée, un peu
floue. On ne retient finalement que l'image des dernières années,
les photos spécialement destinées aux couvertures de
magazines, plus sophistiquées et sans rapport avec le film.
J'entends souvent aussi : "Ben alors, vous êtes mieux qu'à
la télévision !", preuve que les gens ne vont plus
au cinéma. Mais "casser son image", j'ai le sentiment
de ne l'avoir jamais fait. Je crois avoir déjà tourné
des choses très différentes quand j'étais jeune,
et surtout, je n'ai jamais cherché à installer une image,
il n'y a donc rien à casser pour moi ! |
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II
y a des moments où j'ai envie de casser cette image de perfection
qu'on m'accole trop souvent. La femme parfaite, idéalisée
! J'ai envie de faire des pieds de nez. Je crois que cette année,
c'est l'apothéose : Marianne, le parfum... Heureusement que
derrière cette façade léchée transmise
par les magazines, je suis toujours moi ! |
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Je suis une femme puzzle,
depuis le temps qu'on me dit que je suis cassée ! |
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Casser les images à
travers les films permet de vivre mieux ce que l'on fait. Ma crainte
à moi, c'est ça : que je sois comme les gens croient
que je suis et que je sois obligée de toujours conforter cette
image... Nous sommes très très victimes là-dessus.
Car, bien sûr, toutes les actrices ont envie que les gens les
voient comme dans les magazines, idéalisées. Mais c'est
très dangereux, parce qu'on entre dans le mythe, et le mythe
passe par l'absence, des apparitions de plus en plus rares, et de
plus en plus choisies... C'est dangereux, parce que le cinéma
se nourrit de vies, de rencontres, d'expériences... |
Catherine Deneuve, Studio Magazine
1987
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Je crois que les gens
préfèrent l'image d'icône. Je crois que malgré
tout, les gens préfèrent me voir blonde, souriante,
voilà... je pense que même dans les films de Téchiné,
je pense qu'il y a des gens qui ont du mal à m'accepter dans
cette forme de nudité là parce je crois qu'il se trouve
que bon l'image de l'icône ou de l'image comme ça blonde...
est plus réconfortante, plus agréable à regarder
je ne sais pas. |
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Je suis très fataliste.
Je pense que les gens ont le droit de choisir ce qu'ils veulent comme
moi j'ai le droit de choisir ce que je veux. Je fais des films pour
que les gens aillent les voir et c'est vrai que s'il n'y avait pas
de spectateurs, je crois que ça ne m'intéresserait plus.
Mais en même temps, c'est vrai que je peux tenir compte du goût
du public ou des gens qui m'aiment, mais en même temps je ne
peux pas faire mes choix en fonction de ça, ça c'est
impossible. |
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L'image que je donne
est plus sophistiquée que je ne le suis moi-même. Elle
nécessite une importante préparation qui peut être
à la fois un plaisir et une corvée. |
Catherine Deneuve, citée
dans Tausend Augen 2001
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Je trouve que je ne contrôle
pas tellement mon image, puisque je sors et que je ne passe pas mon
temps à me cacher dans les soirées ou derrière
des lunettes noires dans la rue. |
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J'ai toujours voulu vivre
d'une façon un peu désinvolte en dehors du cinéma,
je n'ai jamais cherché à maîtriser mon image,
je n'ai jamais eu d'attaché de presse. |
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C'est quelque chose d'ambigu,
cette image. Car d'un côté, c'est vrai, j'ai toujours
accepté de participer à des manifestations publiques,
officielles, et de l'autre côté, j'ai continué
à... jouer à la marelle, à vivre ma vie, aussi
librement que possible. Je ne me suis jamais laissé enfermer
dans un personnage. |
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Je ne suis pas esclave
de mon image : je la vis, je la subis aussi, mais elle finit toujours
par me ressembler. Chaque matin, lorsque je me regarde dans la glace,
je suis consciente que j'évolue, et que mon image doit évoluer
avec moi. Si je n'avais pas cette lucidité, ce serait vraiment
pathétique. |
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Entre l'expérience,
la notoriété et les films, les gens attendent que vous
correspondiez à l'image qu'ils se font de vous, que vous soyez
toujours... Surtout moi qui donne une image, comme ça, assez
calme, assez harmonieuse... Et dans la mesure où il s'agit
de quelque chose de plutôt positif, qui pourrait imaginer que
ça puisse être difficile à vivre ? C'est vrai
que, parfois, tout ça est un peu trop lourd à porter...
Ce qu'on attend de vous... Cette crainte de ne pas être à
la hauteur... |
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Quand les gens vous connaissent
depuis très longtemps, il n'y a rien à faire, c'est
difficile de les surprendre. Il y a tant d'a priori. |
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La télévision
projette les films en désordre. Un jour, les gens vous voient
sur leur petit écran dans l'un de vos premiers rôles.
Le lendemain, ils vous croisent dans la rue. La superposition peut
être cruelle. Il faut y être attentif. Mais il faut également
savoir s'en moquer. |
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Mais je ne me vois pas
comme un "personnage" et je refuse absolument d'avoir ainsi
une représentation de moi-même... Cela ne m'intéresse
pas et ce n'est pas du tout de cette façon que je veux travailler
ni que j'envisage ma carrière ! |
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L'image que je présente
dans un contexte professionnel me protège, m'enveloppe : j'en
suis peut-être un peu prisonnière, mais elle me protège.
Plus qu'elle ne m'isole. En revanche, dans ma vie, je ne vois que
des gens que je connais bien, des amis de longue date. Et là,
je ne suis plus du tout actrice : c'est peut-être étonnant,
mais je ne pense jamais à ça dans la vie ! |
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Et c'est ce qui m'intéresse
le plus dans ce métier ; pouvoir se déplacer, changer
de personnage. Car rien n'est plus terrible que d'être classée
dans un genre... C'est vrai que moi, avec mes cheveux blonds et ma
silhouette, comme ça, on a tendance à vouloir me figer
dans un rôle de jeune femme blonde, sophistiquée, froide,
glaciale et tout ça ! Et moi, j'ai toujours eu envie de casser
cette image-là ! Parce que je suis fatiguée d'entendre
depuis si longtemps les mêmes adjectifs employés à
mon sujet ! |
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Autant je pense que l'expérience
a facilité certaines choses, autant en ce qui concerne l'image
et l'intimité, j'ai le sentiment que, pour moi, c'est de plus
en plus dur. Parce que plus on sait ce qu'il faudrait donner et plus
on a envie de le donner mais plus on s'approche de ce point-là
et plus c'est douloureux. C'est comme si le fil sur lequel on marchait
était de plus en plus haut. |
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Il est évident qu'on finit par avoir une
image qui se dessine malgré tout, presque malgré vous.
Et il faut savoir si on a envie de bien l'installer ou si on a envie
de ruer dans les brancards et de la faire voler en éclats
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Je crains toujours de
ne pas être assez différente de moi-même. D'ailleurs,
on me reproche souvent d'avoir la même allure, la même
tête. Vous savez, la dame glacée, lointaine. Mais la
différence, c'est autre chose que l'apparence. |
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J'essaie de contrôler
ce que je peux contrôler, mais je laisse passer beaucoup de
choses. Vous savez, je pense que le problème, le danger quand
on est dans le contrôle de l'image, c'est qu'on devient obsédé
par ça, et le problème c'est qu'il y a trop de choses
qu'on ne laisse plus passer. [...] Je ne voudrais pas que les représentations
de photos de moi soient trop éloignées de ma réalité
d'aujourd'hui. Sans doute parce que c'est ma nature, et puis par orgueil
aussi. |
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[A propos du rapport
qu'elle entretient avec son image]
Conflictuel, pas très calme. Le mieux, c'est quand je m'accepte,
aujourd'hui, à l'heure qu'il est, à l'âge que
j'ai. |
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