Sa carrière / Festivals & Honneurs / Festival de Cannes 1994
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Vice-Présidente du Jury
(Président Clint Eastwood)


Hier, j'ai vu Deneuve, magnifique, monter les marches avec Eastwood et aujourd'hui, les revoilà "en couple" pour une interview au soleil. D'habitude, quand un homme et une femme sont interviewés ensemble, on a toujours droit au couplet galant de l'homme qui couvre la femme de compliments. Surtout si la femme est Catherine Deneuve ! Eh bien là non, c'est le contraire. Comme Eastwood ne parle pas le français, c'est Deneuve qui tient le crachoir et elle a pour le beau Clint des mots exquis, comme on voit rarement une femme en dire à un homme, encore moins à la télé. Si elle a accepté d'être au jury, c'est parce que c'était lui le président, qu'il a «de l'éclat», qu'elle «l'admire», etc. Je me dis qu'il va en profiter pour la demander en mariage, en direct à la télé, ça aurait été beau, mais non... Décidément, la télé, c'est toujours moins bien que le cinéma.
Marc Esposito , Studio Magazine 1994



C'est une expérience. Je me dis que, même s'il y a des moments difficiles, je vais avoir la possibilité de voir des films du monde entier plusieurs fois par jour, pendant deux semaines. Pour quelqu'un qui aime le cinéma comme moi, c'est très excitant, stimulant même. C'est presque la réalisation d'un rêve secret d'aller autant au cinéma. Surtout sans avoir mauvaise conscience: à Cannes, je n'aurai rien de plus important ni de plus urgent à faire que d'aller au cinéma deux fois par jour !

Une bonne Palme d'or, ce serait une vraie surprise, un film peut-être inattendu, mais avec un potentiel grand public et auquel la Palme, justement, donnerait une plus grande chance encore de toucher le public. Vous voyez, je veux tout en même temps ! Mais c'est impossible, c'est comme vouloir un vêtement qu'on pourrait porter durant toutes les saisons...

Je suis contre les Palmes ex aequo, parce que je trouve que ça minimise le prix.


On m'avait déjà proposé plusieurs fois d'être présidente et j'avais refusé. Je ne suis pas sure que ce soit le rôle des acteurs de jouer les juges ! Là, j'ai accepté d'abord parce que j'étais vice-présidente, ensuite parce que c'était avec Clint Eastwood, et aussi, finalement, pour tenter cette expérience. Une fois m'a suffi ! Cela dit, ça rend plus paisible, après, sur les prix... Parce que c'est d'une telle cruauté quand, à la fin, il faut choisir entre deux films, deux actrices, deux acteurs, tous formidables. C'est terrible. Je ne renouvellerai pas l'expérience, c'est trop injuste...

J'avais des réticences, et cela m'a bien confirmé toute l'injustice qu'il pouvait y avoir dans une remise de prix. Avec Eastwood, on avait des rapports à l'américaine, très clairs, très nets. Pas un mot plus haut que l'autre. Ce qui a été très pénible, c'est tout ce qui s'est écrit après la proclamation du palmarès. On a dit que j'avais manipulé le jury... Alors, j'ai essayé à ma manière de rectifier une telle injustice. Qu'on ait pu croire que j'avais un sentiment de mesquinerie par rapport à une autre actrice, c'est insupportable ! J'ai réagi parce qu'il y a des journalistes, surtout des femmes, qui ont parlé du pouvoir que j'aurais pu utiliser pour écarter du palmarès "La Reine Margot" avec Isabelle Adjani. C'est nul. De toutes façons, je savais qu'en bien ou en mal on serait jugé...

Sur Tarantino, ça n'a pas été difficile, il a fait l'unanimité. Mais, j'ai eu beaucoup de mal à défendre Nanni Moretti. Je crois qu'il faudrait assurer un équilibre, dans le jury, entre Anglo-Saxons, Latins et Européens. Car les Anglo-Saxons ne comprennent pas notre cinéma.

[La palme d'or pour "Pulp fiction"] s'est d'ailleurs décidé à l'unanimité. C'est un film moderne, gonflé, audacieux. D'une belle virtuosité. Et il y a une vraie jubilation du cinéma. Tarantino, en plus d'être un grand metteur en scène, est quelqu'un qui aime les acteurs. Quant au reste du palmarès, ne me demandez rien, je suis toujours tenue au secret ! Je vous dirai juste que j'ai beaucoup défendu "Journal intime" de Moretti qui est l'un de mes cinéastes préférés. Le problème, à Cannes, c'est que, quand même, les films non anglo-saxons ont moins de chance !

J'ai été juré à Cannes, en même temps que Clint Eastwood, j'ai donc été confrontée aux dilemmes auxquels, inévitablement. se heurtent les membres de ce jury. L'ultime choix auquel on est tenu de procéder s'effectue presque toujours entre quelques films dont les qualités sont presque toujours égales. On est nécessairement poussé à l'injustice. Un sentiment très désagréable. D'autant plus qu'on vous accusera ensuite de partialité. Comme si, dès l'origine, nous avions su quelle serait finalement notre décision. Enfin, c'est la règle du jeu !

Je suis sure que [le jury] n'est pas la place des acteurs. Le choix est difficile, et souvent, tout se joue dans un mouchoir de poche. Pourquoi celui-ci plutôt que celui-là ? Or, c'est une vraie responsabilité. Sur Tarantino, ça n'a pas été difficile, il a fait l'unanimité. Mais, j'ai eu beaucoup de mal à défendre Nanni Moretti. Je crois qu'il faudrait assurer un équilibre, dans le jury, entre Anglo-Saxons, Latins et Européens. Car les Anglo-Saxons ne comprennent pas notre cinéma.

Pour moi, la notion de mérite en art n'a pas beaucoup de sens. Quand j'ai été coprésidente du Festival de Cannes, j'ai réalisé combien les palmarès, les palmes sont injustes. On essaie de faire partager ses convictions aux autres et le résultat final est souvent l'objet d'un compromis plus ou moins arbitraire.

 



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Studio Magazine 1994