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Extraits d'interviews
de Catherine Deneuve

C'est une histoire proche de ce qu'on
appelle aujourd'hui la difficulté de vivre. Je n'ai pas connu
personnellement ce genre de situation, mais des amis autour de moi,
si. Entrer par amour dans un univers qui vous est opposé ne
peut se faire que par la souffrance. C'est si difficile d'ajuster
ses sentiments ! Isolé de tout contexte social, un tel amour
peut marcher. Sinon on ressent comme une douleur l'hostilité
de la société. Moi, non. Je me protège tout le
temps, sans cesse, avec mes enfants et aussi avec un petit groupe
d'amis sûrs qui me renvoient l'image de moi-même qui m'est
familière... Cinq semaines de tournage en province (le tournage
s'est déroulé à Biarritz), c'était très
bien. Une bonne rupture... Ces vieilles stations balnéaires
ont toujours pour moi ce côté décadent et décalé.
On y côtoie des gens qui voudraient bouger, qui se disent :
"Ma vie n'est pas arrêtée, tout est encore possible",
et en fait, ils restent rivés à leur univers. André
Téchiné a parfaitement rendu cette nostalgie au quotidien
d'une certaine province. A Paris, nous n'avons pas le temps d'avoir
cette nostalgie-là.. Enfin rarement... |
Catherine Deneuve, citée
dans le livre de Philippe Barbier et Jacques Moreau 1984
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Je me suis foncé les cheveux. Pour le
film uniquement ; je suis une jeune femme qui s'installe en province.
Elle ne s'y installe pas vraiment, elle y travaille. Alors, ma couleur
blonde habituelle m'a semblée trop claquante pour ce rôle.
J'ai recherché un ton plus discret, plus doux.
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On a tourné "Hôtel
des Amériques", à Biarritz, hors saison, en mai.
Dans un hôtel spécialement ouvert pour l'équipe.
Les tournages hors de Paris rendent plus disponible : on dîne,
le soir, après les prises ; on se voit le dimanche... S'ils
doivent se créer, les liens se créent plus vite. Mais,
vous savez, je crois que tout se joue en quelques minutes. Certains
vous donnent envie d'entreprendre à leurs côtés
de longs voyages, tandis qu'avec d'autres vous ne songeriez même
pas à traverser la place de l'Etoile ! Je fais des erreurs,
dans la vie, comme tout le monde, je suis même si critique que
je peux apparaître dure à certains. Mais question amitié,
confiance, je ne me trompe pas souvent. Avec André, ce fut
immédiat. |
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Les films avec André représentent
des moments particuliers. Je suis toujours sortie de ses tournages
assez bouleversée. Bouleversée que ça s'arrête.
Je suis, de nature, plutôt stoïque et réaliste.
Mais je me souviens qu'à la fin du tournage d' "Hôtel
des Amériques", pour la première fois, j'avais
éprouvé une sorte de mélancolie... |
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J'étais à la fois très triste
mais pas trop étonnée de l'échec de "Hôtel
des Amériques". Le film était très beau
mais si pessimiste, si dérangeant, que j'ai pu comprendre le
rejet du public. |
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[à propos de Patrick
Dewaere]
Je souffrais de le voir ainsi. Je sentais bien à quel point
il était fragile. C'était un homme qui se lançait
comme ça... Il avait des élans. Il s'emballait et, après,
il donnait l'impression d'être déçu, triste. Il
avait donc besoin de trouver des palliatifs à sa tristesse.
Souvent, d'ailleurs, dans ses films, il a cet air à la fois
triste et étonné, comme si quelqu'un lui avait fait
une mauvaise surprise. C'était un acteur absolument formidable,
mais il était trop près de ses personnages. Il était
trop lui-même. Il allait presque trop loin dans l'émotion.
Certains acteurs ont un formidable instinct de conservation et d'autres
ne l'ont pas. Patrick ne l'avait pas. |
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Extraits d'interviews
d'André Téchiné

Le première image de Catherine,
ce sont les films de Demy ou Buñuel. Je rêvais d'avoir
un jour CATHERINE DENEUVE devant ma caméra. La rencontre s'est
faite par l'intermédiaire de Gérard Lebovici, qui était
mon agent à l'époque. Et le sien. Il y avait un désir
commun de tenter cette expérience. On ne se connaissait pas,
et puis, bien vite... la complicité, la confiance... Le miracle
de notre rencontre, c'est quelque chose qui n'arrive pas tous les
jours, dans une vie de cinéaste. Catherine est devenue comme
une sur. |
André Téchiné,
Studio Magazine 1996
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J'ai rencontré Deneuve dans la vie avec
"Hôtel des Amériques". C'est peut-être
un des films où elle est la plus belle parce que c'est une
beauté qui n'appartient pas à un âge précis
de la vie. Pendant le tournage, il y a eu un moment où elle
m'a sidéré. C'était une scène de nuit
à Biarritz où Patrick Dewaere faisait une tentative
de suicide dans l'océan. Il faisait un froid de canard. Patrick
avait pu se mettre une combinaison de caoutchouc, mais, elle, on voyait
ses jambes, c'était absolument terrible. On avait tous très
peur qu'elle ait très froid, qu'elle soit malade. Elle a fait
ça très courageusement et puis elle a disparu. Je suis
rentré à l'hôtel en me sentant un peu coupable
d'être allé trop loin. A ma grande surprise, je l'ai
découverte dans sa chambre. Elle buvait un whisky écoutait
de la musique, heureuse, folle de joie, parce qu'elle sentait que
la scène avait marché, qu'elle s'était jetée
à corps perdu là-dedans, qu'elle avait été
au charbon et avait dépassé ses propres limites. |
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C'est, de toute évidence, une actrice
instinctive. Elle ne travaille pas vraiment. Dans "Hôtel
des Amériques", le contraste était total entre
Patrick Dewaere, qui avait besoin de bosser ses répliques,
de préparer minutieusement les scènes, et Catherine,
qui, j'en suis sûr, apprenait son texte dans sa loge, au moment
du maquillage. Lui était parfait dans son ardeur, elle, dans
la fraîcheur.
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Comme je l'ai dit, Catherine arrive à
m'étonner en allumant une cigarette ou en ouvrant une porte.
Mais il y a deux moments où elle m'a stupéfié
: dans "Hôtel des Amériques" quand elle entre
dans le casino pour demander secours à un vieil ami. Cette
fièvre, ce regard somnambulique, sa démarche souple
et rapide : là, j'ai été sidéré.
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Là, soudain, j'avais
des acteurs dont j'avais envie de me rapprocher au plus près.
Avec Catherine Deneuve et Patrick Dewaere, aucun désir de prendre
du recul. Mais de coller au mystère de l'une, à la sensibilité
écorchée de l'autre. |
André Téchiné,
Télérama 2003
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Extraits d'interviews
de Patrick Dewaere

Elle est vraiment très
sympa, très gentille
Très différente de
ce qu'on attend
Et puis, elle "assure"
C'est
reposant de jouer avec une comédienne pareille. |
Patrick Dewaere, Première
1981
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Extraits de critiques

Patrick Dewaere a rarement été
aussi sincère. Catherine Deneuve, que l'on pourra plus jamais
soupçonner de froideur, joue comme elle n'a jamais joué.
Téchiné s'en prend efficacement aux machos (personnage
du copain parasite campé par Etienne Chicot), il donne le très
joli rôle d'Elise (la sur de Dewaere/Gilles) à
Sabine Haudepin et permet aux " comiques " du café-théâtre,
Josiane Balasko et Dominique Lavanant, de jouer dans un registre plus
émouvant. |
Paris-Match 1981
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1981
Couleurs
1h33
Rôle d'Hélène

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Réalisateur
: André
Téchiné
Acteurs : Patrick Dewaere, Etienne
Chicot, Josiane Balasko, Sabine Haudepin, François Perrot, Frédérique
Ruchaud, Jean-Louis Vitrac, Dominique Lavanant
Scénario : André
Téchiné, Gilles Taurand
Photo : Bruno Nuytten
Musique : Philippe Sarde
Résumé
: Une jolie veuve, repliée sur ses souvenirs, rencontre un demi-marginal.
Nominations
Césars 1982 : Actrice / Second Rôle Féminin
Site
sur Patrick Dewaere

Photos du tournage


Photos du film







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