|
Extraits d'interviews
de Catherine Deneuve
Il y a deux raisons qui
pouvaient me faire tourner pour la télévision : un sujet,
qui se prêtait à un traitement long, comme celui-ci,
ou un rôle. On me propose toujours des rôles de femmes
avec des hommes très jeunes, ou des rôles de femmes qui
sont dans une partie très calme de leur vie, ce qui ne correspond
pas du tout à ma nature. Merteuil est un rôle féminin
très fort, un rôle qu'on ne peut pas refuser. Quand j'ai
vu le "Balzac" de Josée Dayan, j'ai trouvé
qu'elle avait dans sa façon de filmer quelque chose de très
romanesque et de très vivant qui m'a plu. |
Catherine Deneuve, Paris Match
2003
|
J'avais vu ses réalisations.
Et puis je l'ai rencontrée par hasard à New York, où
nous avons dîné ensemble et parlé d'une telle
éventualité. Comme je ne m'y suis pas opposée,
elle s'est très vite arrangée pour concrétiser
mon envie, si envie il y avait. Elle a une personnalité à
la fois si forte, directe, et si délicate. Je me suis dit pourquoi
pas ? |
|
Il y a quelques années
encore, je ne sais pas si j'aurais accepté ce rôle. J'ai
toujours eu une attitude mitigée pour endosser les habits de
grands personnages historiques. Le fait que cette adaptation se passe
dans les années 60 m'a convaincue. |
|
C'est une période
et un lieu - Saint-Tropez - que j'ai connus quand j'avais 20 ans,
où il y avait une vraie insouciance avec les hors-bord italiens
en bois, un certain milieu artistique, des modes musicales, comme
celle du madison... J'étais une jeune fille et je découvrais
d'un peu plus près la vie de femmes plus mûres que moi.
Et puis, évoquer ces années permettait aussi de parler
de problèmes de murs, comme l'avortement - en 1971, j'ai
d'ailleurs signé le fameux Manifeste des 343, demandant la
légalisation de l'IVG. |
|
J'ai toujours été
persuadée qu'un acteur de cinéma devait faire de la
télévision en position de force. C'est-à-dire
qu'il faut que cela reste un choix, pour qu'on ne laisse pas entendre
qu'Untel, qui ne fait plus de cinéma, se réfugie vers
le petit écran. J'ai accepté de tourner dans ce téléfilm
simplement parce que le projet était plaisant et qu'il y avait
des rencontres nouvelles à faire. |
|
Ce qui m'a poussée
aussi à faire ce téléfilm, c'est que j'incarne
une grande amoureuse et - je le dis sans coquetterie -, je ne pourrais
plus le faire longtemps. |
|
C'est un personnage comme il est rare
d'en trouver au cinéma, qui existe davantage au théâtre.
Le genre de rôle qu'à un certain moment dans la carrière
d'une actrice, on ne vous propose pas. C'est un grand personnage,
parce que c'est une femme amoureuse. Même si elle est perverse.
Mais on a toutes les excuses lorsqu'on est amoureux. Il y a de la
violence, de la force, de la jalousie dans ce personnage qui est aussi
une femme de goût. |
|
Même si elle est
d'un grand machiavélisme, si elle décide tout, Madame
de Merteuil est aussi quelqu'un qui aime. Or, on n'a pas de plus grande
tolérance que pour tout ce qui touche à l'amour, regardez
comment les gens réagissent aux crimes passionnels. C'est un
sentiment tellement irrationnel et subjectif qu'il nous paraît
évident de le voir conduire à tous les excès.
C'est en tout cas le sentiment pour lequel j'ai personnellement le
plus d'indulgence. Et, avec Madame de Merteuil, l'amour a une telle
violence qu'il dépasse tout ! |
|
Madame de Merteuil veut
effectivement être libre, même si l'amour peut conduire
à la mort. C'est tout le sens de sa réplique, lorsqu'elle
dit à son ancien mari : "Je ne veux pas qu'un homme me
parle sur ce ton". Parfois, en jouant certaines scènes,
je me suis surprise à penser : "Mais quelle femme ! Quelle
femme !". |
|
C'était très
amusant à jouer ! On n'a pas souvent l'occasion, en tant qu'acteurs,
de jouer des personnages hors normes comme celui-là, aussi
diabolique ! Je n'oublie jamais l'idée que c'est de la fiction
! |
|
C'est un rythme rapide auquel je n'étais
pas habituée. D'autant plus que Josée Dayan fait en
trois mois ce qui en prendrait cinq à un autre metteur en scène.
C'est rapide ! Alors forcément, il y a des choses qui passent
à la guillotine. Mais il y a une telle énergie qui se
dégage d'elle. Tout cela ne m'a pas dérangée.
|
|
Josée, c'est une
grande gueule, c'est vrai. Mais je préfère ça
aux indécis ! C'est tellement stimulant de se sentir aimée.
On se sent attendu, regardé, c'est rassurant. Tous les acteurs
doutent. Nous avons besoin d'amour, comme tout le monde, peut-être
encore plus. |
Catherine Deneuve, Paris Match
2003
|
Rupert Everette est un
acteur plus sexué que Gérard Philipe. Rupert a un côté
plus diabolique. Le sexe est important dans "Les Liaisons",
et je trouve que Rupert Everett, sans montrer grand-chose, paraît
évident. |
|
Josée Dayan cherchait
un jeune acteur avec une certaine élégance pour jouer
le mari de Madame de Tourvel et elle ne le trouvait pas quand nous
avons pensé à Christian [Vadim]. En fait, je n'ai pas
eu de scène face à face avec lui. Je ne sais pas d'ailleurs
si j'aimerais ça ou si je le redouterais. |
|
Extraits
d'interviews de Josée Dayan
J'ai conçu "Les
liaisons dangereuses" pour Catherine Deneuve. Je voulais un personnage
de femme complexe comme elle. Merteuil est un des plus beaux personnages
de la littérature française. Ce n'est pas seulement
quelqu'un de froid et de manipulateur, c'est quelqu'un qui a des faiblesses
et des vulnérabilités avec, comme Catherine, beaucoup
d'élégance et d'humour. |
Josée Dayan, Paris Match
2003
|
Il fallait trouver un personnage à l'image
de Catherine Deneuve. Elégant, complexe, séduisant et
séducteur, mais avec ses failles, sa distance, sa fragilité,
sa froideur. |
|
J'aime les mythes, les monuments du cinéma.
Je suis heureuse de travailler avec eux. Ce sont des Rolls. Et moi
j'aime les Rolls. |
|
Madame de Merteuil est d'une intelligence absolument
incroyable, elle manipule tout son monde. Catherine Deneuve interprétant
ce rôle, j'ai mis particulièrement l'accent, dans la
mise en scène sur sa position de leader absolu dans cette histoire.
Elle est aussi le pivot de l'image. |
|
Pour notre adaptation, j'ai demandé à
Eric-Emmanuel Schmitt que Merteuil ait une fêlure, une vulnérabilité.
Une blessure qui n'est pas présente dans les autres adaptations,
ni dans l'uvre de Laclos d'ailleurs. En observant Catherine
Deneuve évoluer à travers ses films, j'ai été
frappée de voir à quel point cette femme, avec sa beauté,
son charisme, son physique absolument parfait, pouvait aussi laisser
se dévoiler des fêlures. Dans "Ma saison préférée"
par exemple, le film d'André Téchiné, je la trouve
absolument bouleversante. J'avais envie qu'il y ait à l'origine
de l'amoralité de Merteuil, une blessure tellement violente
que cette femme d'un orgueil absolu - elle a été terriblement
blessée par la trahison de Gercourt - retourne cette blessure
de façon positive pour l'ériger en mode de vie. |
|
Catherine Deneuve est une actrice complexe, subtile.
Elle ne surjoue jamais, son émotion est sincère, à
fleur de peau. Madame de Merteuil est un personnage mystérieux,
impénétrable. Catherine Deneuve est parfaite dans ce
rôle, elle n'annonce pas la couleur, ce qui la rend encore plus
troublante. À l'issue de ces trois films, il restera encore
des zones d'ombres et de mystère, et c'est très bien
ainsi. Le mystère est ce qui nous fascine le plus. Le mystère
fait partie du cinéma. Catherine Deneuve peut, sans artifice,
faire passer toute cette palette de sentiments, et à la fois,
elle a cette retenue. Catherine Deneuve marquera ce personnage. Elle
est merveilleusement mystérieuse
|
|
Extraits
d'interviews du scénariste et des partenaires
Il y a un peu plus de deux ans, Josée
Dayan avait rencontré Catherine Deneuve par hasard à
New York et l'avait convaincue de travailler avec elle. Elle lui
cherchait un grand rôle. [...] Lorsqu'elle m'en a parlé,
j'ai tout de suite pensé à Merteuil parce que c'est
à mon avis l'un des plus beaux personnages féminins
de la littérature. Deneuve, par ce qui émane d'elle,
par sa façon de se tenir en retrait, de montrer sa force
et de rester opaque, lui correspond à merveille. |
|
J'en ai rêvé à partir d'elle.
Je me la figurais avec un foulard tenant ses cheveux noués,
avec des lunettes sombres et des gants, un peu comme dans "Belle
de jour". J'aime cette élégance sophistiquée
des années 60. Pour Deneuve, j'ai voulu inscrire Merteuil
dans des zones de mystère. C'est un personnage vulnérable
et énergique, machiavélique et éperdu. |
|
Nous avons transposé l'histoire
dans les années 1960 pour moderniser, d'abord parce que je
pense que le film de Stephen Frears était tellement extraordinaire
que l'adaptation au XVIIIe siècle était faite. Nous
voulions faire autre chose, c'est-à-dire montrer comment
ces "Liaisons dangereuses", ces relations de mensonge,
d'amour, de désir et de trahison entre ces personnages, nous
parlaient tout autant aujourd'hui (...) et en même temps de
faire comme Laclos, c'est-à-dire de ne pas le mettre aujourd'hui,
puisque Laclos a publié le livre en 1782 et il indique que
cela c'est passé il y quelque temps, mais ce n'est même
pas sûr que ce soit en France ni à notre époque. |
|
Catherine, je l'adore depuis toujours. Elle
est tellement chaleureuse et drôle. Le rôle de Madame
de Merteuil lui va si bien : cette femme qui contrôle tous
ces gens, tous ces curs, tous
ces sentiments". |
|
Je suis fou d'admiration
pour Catherine Deneuve. Jouer avec elle, c'est comme jouer au tennis
avec un champion ! |
Rupert Everett, Paris Match
2003
|
Costumes

Les costumes de Catherine Deneuve sont réalisés
par Jean-Paul Gaultier, qui a trouvé Catherine Deneuve particulièrement
inspirante : "Cela a été très enrichissant
pour moi, parce que j'ai appris beaucoup, j'ai vu à quel point
elle pouvait être juste et avoir toujours conscience du rôle,
c'est-à-dire que je proposais quelque chose et elle me remettait
aussitôt en me disant, non, à ce moment là elle
ne peut pas séduire, donc elle ne peut pas s'habiller de cette
façon-là".

Croquis réalisé par Pascal Moncapjuzan
Extraits
de critiques

Rupert Everett est parfois
caricatural en prédateur pervers d'autant qu'il est très
mal doublé. Toutefois, Josée Dayan livre là
un produit commercial efficace digne de TF1 : les dialogues d'Eric-Emmanuel
Schmitt sonnent justes et la réalisation est très
soignée. "C'est une lecture plus moderne, plus violente
de l'oeuvre originelle", prévient-elle. La prestation
de Catherine Deneuve, resplendissante en libertine manipulatrice,
devrait suffire à attirer le public. |
Nathalie Simon, Le Figaro 2003
|

|
2002
Couleurs
2 x 120 min
Rôle de Madame de Merteuil

|
|
Réalisateur : Josée Dayan
Acteurs : Rupert Everett, Nastassja Kinski, Leelee Sobieski,
Danielle
Darrieux
Scénario : Eric-Emmanuel Schmitt
Photo :
Musique : Angelo Badalamenti
Résumé : Adaptation télévisée
des "Liaisons dangereuses" de Choderlos de Laclos, transposée
dans les années 60.
Tourné en 2 versions : française et
anglaise.
Extraits sonores
Photos du tournage









Photos du film















Photos de la promotion



|