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Extraits d'interviews
de Catherine Deneuve

II m'a fait lire un
bouquin. Je me suis vexée comme un pou. Je lui dis pas question.
Quelque chose comme ça. [...] II me proposait "Naïves
Hirondelles", la pièce merveilleuse de Roland Dubillard.
Mais il s'agissait d'un rôle d'idiote. Comme une idiote, j'ai
refusé (elle rit). Plus tard, je me suis dit que j'avais été
idiote et c'est comme ça qu'on a fait "Répulsion"
qu'il a écrit avec Gérard Brach, devenu un ami. |
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Je suis sure que c'est un film qui
n'a pas bougé. On tournait à Londres, en studio, et
à cause du lapin pourri, des mouches, il y avait de ces odeurs
! Avec Polanski, j'avais fait auparavant une erreur de jeunesse. La
première fois, il m'avait proposé de faire "Naïves
Hirondelles". Je l'avais refusé car je trouvais que Ie
personnage était complètement idiot. J'étais
presque vexée qu'il m'ait proposé un rôle de sotte
! |
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Un jour, Polanski est
venu dans le studio pour tourner le générique d'un court-métrage,
il m'a vue et m'a engagée pour "Répulsion".
Là encore, j'ai beaucoup appris et c'était un film formidable.
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J'ai gardé un merveilleux souvenir de Répulsion,
parce que nous étions, pendant le tournage, comme deux émigrés
à Londres, Roman et moi, les deux seuls à parler le
français. Ce qui est formidable avec lui, c'est qu'il supervise
lui-même absolument tout. Il a été acteur, il
fait le décor, il connaît les lumières. Dans son
école de cinéma, on lui a tout appris. C'est la raison
pour laquelle ses films ont vraiment un goût. Je ne parle pas
de bon goût, mais un goût, simplement, le goût Polanski.
En plus, j'ai beaucoup apprécié le côté
morbide de mon personnage. C'est très agréable, pour
un acteur, de jouer une méchante : on a vraiment quelque chose
à faire, on le sent bien. C'est d'ailleurs un peu la même
chose dans les comédies : on court, on fonce, on joue sur son
mouvement. |
Catherine Deneuve, citée
dans le livre de Philippe Barbier et Jacques Moreau 1984
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Avec Roman, on se parlait en français,
ça nous rapprochait. C'était très marrant, on
allait dans des endroits très rigolos, ça remuait pas
mal, c'était une époque très insouciante. Mick
Jagger était l'un des meilleurs amis de mon mari, le photographe
David Bailey. |
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Lorsque nous avions tourné
"Répulsion" en Angleterre, Roman était très
peu connu. Le fait d'être les deux seuls Français, avec
Gérard Brach, le scénariste du film, nous avait rapprochés
- bien qu'il soit polonais. Roman parle parfaitement le français,
mieux que l'anglais. J'étais jeune à l'époque,
c'était juste après "Les Parapluies de Cherbourg".
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Juste après les
"Parapluies", j'ai par exemple tourné "Répulsion",
avec Roman Polanski, qui n'avait fait que "Le Couteau dans l'eau",
en Pologne, et que personne ne connaissait en France. Ce n'était
pas un choix évident pour une jeune actrice... |
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Ce film ne valorisait
pas directement ma féminité. Je découvrais des
choses bien plus troubles, une pulsion violente dans beaucoup de douceur.
Polanski me disait, par exemple, approchant la caméra de mon
il, que j'avais l'il inquiet, comme celui d'un cheval,
d'un poulain... |
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Les deux personnages dont
je me sens le plus proche sont Tristana et Carole, l'héroïne
de "Répulsion". A cause de la timidité et
d'une certaine solitude. Carole, c'était la folie de quelqu'un
qui ne supporte pas d'être laissée seule. Par contre,
il m'est impossible de m'identifier à Belle de Jour. C'était
amusant à jouer mais c'était impossible de s'identifier.
Je vais sans doute décevoir beaucoup de monde... |
Catherine Deneuve, citée
dans le livre de Françoise Gerber 1981
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Extraits d'interviews
de Roman Polanski

Quand m'est venue l'idée de "Répulsion",
j'ai songé à elle. Sa personnalité, sa beauté,
et sa façon de jouer me plaisaient. Disons-le, j'étais
déjà un de ses admirateurs. Travailler avec elle fut
une rencontre dont je me souviens avec nostalgie. Elle s'est mise
entre mes mains, attendant chaque jour mes suggestions, me regardant
comme un élève regarde un professeur en qui il a confiance.
Notre seul différend eut lieu au cours d'une scène
déshabillée. Elle portait, sous une chemise de nuit
transparente, une culotte que je voulais qu'elle retire par souci
de vérité. Elle était très gênée
car c'était la première fois que cette femme pudique
se dévoilait. Ce n'est pas à moi de dire si "Répulsion"
fut un tournant de sa carrière, mais on l'a dit.
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Extraits de critiques
Ce film d'épouvante, à
son tour, est le prétexte à un exercice de style fort
brûlant. Qui, comme tout exercice de style lorsqu'il est réussi,
comporte sa propre parodie. La construction sans défaillance,
les citations d'auteurs, le recours à un symbolisme indiscret
(envoyer comme carte postale la tour de Pise à une névrosée
sexuelle !), la féroce satire des milieux décrits (le
salon de beauté, les clients du pub), l'excès même
de certains procédés : c'est par cela que Polanski,
au moment où nous sommes sa victime ravie, montre le bout de
l'oreille. |
Arts 1966
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Un chef-d'uvre
du film d'épouvanté et de fantastique psychologique.
Roman Polanski poursuit brillamment une carrière axée
sur la cruauté glaciale en transformant la frêle Catherine
Deneuve en une sanglante meurtrière schizophrénique.
La description clinique des progrès de sa folie s'accompagne
de superbes trouvailles visuelles qui font peu à peu monter
l'épouvante jusqu'à un dénouement d'une terrifiante
violence mais restant cependant d'une pureté bien éloignée
des effets de grand-guignol. La manière dont Polanski passe
du réalisme au fantastique est celle d'un maître. |
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La direction d'acteurs
- c'est plutôt de direction d'actrices qu'il faudrait parler
ici - s'exerce de telle manière que chaque geste, chaque position,
chaque mouvement de Catherine Deneuve renvoie à son état
général. La façon dont elle se frotte le nez,
croise les jambes, marche sur le trottoir sans prêter attention
à ce qui se passe autour d'elle, s'assied, voûtée,
sur un banc, ou traverse un pont, inattentive aux mouettes qui volètent
ça et là, prouve que le metteur en scène et le
psychiatre, ici, ne sont plus qu'un. Il est d'ailleurs anormal que
Catherine Deneuve ne suscite que de l'incompréhension de la
part de ceux qui la côtoient : sa sur et l'amant de cette
dernière, l'amie de l'institut de beauté, le garçon
qui la désire et qu'elle tuera le premier dans un moment de
peur ne devinent pas ce qui se cache derrière la fragilité
de cette fille au regard perdu, en proie à des dégoûts
d'ordre sexuel... [...] Les phantasmes de Catherine Deneuve deviennent
à chaque instant plus obsédants, plus atroces. Polanski
a cependant su éviter tout détail sordide ou délibérément
obscène. Pendant la scène avec le propriétaire,
Catherine Deneuve est beaucoup plus proche de l'oiseau blesssé
qu'un sursaut de révolte tient encore en vie que du monstre
à condamner sans recours... |
Bernard Cohn, Positif 1966
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Hagarde, claustrée,
déformée par le grand-angle, graduellement ravagée
de tics, de phobies et de pulsions meurtrières, l'actrice livre
une saisissante composition morbide, fondant son jeu sur une sorte
d'absence autistique secouée de paniques brutales. Elle évite
le cabotinage de la folie et le grand-guignol où d'autres auraient
complaisamment versé, et donne à son personnage de psycho-killer
féminin un pouvoir de fascination rare. |
Le Mensuel du Cinéma 1993
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Je n'ai jamais vu quelqu'un jouer aussi bien
la folie. Généralement, l'acteur se vautre dans les
outrances. Les grimaces, le zoo. Dans "Répulsion",
de Polanski, Catherine fout vraiment les jetons ! Elle parvient,
apparemment sans rien faire, à faire surgir les zones les
plus profondément enfouies de l'inconscient. Elle donne l'impression
que la sagesse et la folie se superposent. Mieux : qu'elles s'imbriquent.
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1966
Grande-Bretagne
Noir et Blanc
1h45
Rôle de Carole
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Réalisateur
: Roman
Polanski
Acteurs : John Fraser, Patrick Wymark,
Yvonne Furneaux, Ian Hendry, Valerie Taylor, Helen Fraser, Monica Merlin
Scénario : Roman
Polanski, Gérard Brach
Photo : Gilbert Taylor
Musique : Chico Hamilton
Résumé
: Hélène part en vacances avec son fiancé, laissant
l'appartement à Caroline, sa sur. Après un incident
dans le salon de beauté où elle travaille, celle-ci s'enferme
peu à peu dans l'appartement où elle est victime d'agressions
imaginaires et de visions terrifiantes.
Festival de Berlin 1965
Prix
Festival de Berlin 1965 : Ours d'Argent
Nominations
British Academy Awards : Photo
Photos du tournage





Photos du film






Photos de la promotion

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