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Les phrases qui suivent sont extraites d'interviews de magazines et ne constituent pas une interview exclusive accordée par Catherine Deneuve à Philippe Barbier : les sources sont indiquées dans le livre.

Vous ne passez pas de l'autre côté de la caméra.
Jamais je n'ai mis mon œil derrière une caméra sur un plateau. Jamais !

Vous avez peur de quoi ?
J'ai peur de ne plus pouvoir retourner devant la caméra.

Tout le monde est double. Chez moi, cela se voit peut-être plus que chez d'autres. J'ai en même temps, c'est vrai, un besoin de sécurité et une tentation d'équilibriste. Qui n'est pas ainsi ? Quant à la froideur... Je peux être aussi chaleureuse. Je suis assez cyclothymique.

On me voit comme une couverture de Jours de France, pourtant je ne suis pas "pure et glacée".

Je crois qu'il n'y a plus de stars à de très rares exceptions près. Regardez la nouvelle génération des acteurs américains et même européens : Dustin Hoffman ou Robert de Niro, n'auraient sans doute pas pu faire une carrière de vedettes, il y a vingt ans ; on ne retrouve plus aujourd'hui des physiques comme ceux de Gary Cooper ou Tyrone Power. L'aspect physique a beaucoup évolué : les femmes, les actrices, restent jeunes plus longtemps, et l'image donnée par les actrices est plus proche de la réalité qu'elle n'a jamais été. J'espère quant à moi, pouvoir continuer ma carrière, c'est-à-dire être acceptée plus longuement que ne l'ont été ces actrices, interrompues dans leur carrière et ne pouvant revenir qu'après une longue éclipse, comme cela été le cas pour Joan Crawford ou Bette Davis. Il me semble que le cinéma va dans ce sens-là et qu'à l'avenir il sera plus facile à une actrice d'être acceptée plus longuement.

Le gros plan me fait souffrir par ce que je n'ai alors d'autre partenaire que la caméra ou qu'une marque à la craie à côté de l'objectif. Je n'éprouve aucun plaisir à être ainsi bloquée. Immobilisée.

Je reste secrète sur ma vie privée. Je trouve qu'on doit se contenter de mon image, on n'a pas besoin d'en savoir plus.

Un metteur en scène qui ne sait pas parler aux acteurs, c'est quelqu'un qui est infirme.

Il y a trois catégories de vedettes. Celles pour qui on va au cinéma. Elles sont peu nombreuses : Liz Taylor, Audrey Hepbum, Sophia Loren, Brigitte Bardot et peut-être deux ou trois autres. Il suffit de connaître leurs cachets d'ailleurs pour comprendre. Il y a ensuite les vedettes que l'on va voir dans un film de... Mais, le plus souvent, le public va voir un film de... avec... Moi, je fais partie de la troisième catégorie.

Le cinéma est une forme de passion.

En général, avec un metteur en scène, j'essaie de comprendre d'abord comment il fonctionne, sans oublier, bien évidemment, ce dont moi j'ai besoin... Ce que j'attends surtout, c'est une espèce de cohérence entre ce qu'ils disent, ce qu'ils font, ce qu'ils ont écrit, ce qu'ils ont choisi de raconter.

Je lis tous les scénarios que l'on m'envoie. Je refuse quand ce n'est pas forcément original pour moi. Ce qui m'intéresse n'est pas toujours ce qu'a y a de meilleur. Mais il me faut un déclic, un désir profond, une envie personnelle.

J'aimerais jouer des personnages plus durs, comme Barbara Stanwyck, cette actrice américaine à la voix rauque.

Le cinéma, c'est tout de même fondé sur le physique, et les acteurs ont du mal à accepter cette idée... On parle bien, d'ailleurs, de la nature féminine. Eh bien, je crois que les acteurs les plus épanouis sont les acteurs qui ont des natures féminines. Quand je dis "féminines", cela ne veut pas dire autre chose que "féminines", quelque chose de féminin qu'ils ont en eux. Je donne tout de suite un exemple pour qu'il n'y ait pas de malentendu : Depardieu, pour moi, est un acteur féminin.

Je ne me retourne jamais sur ma carrière. Une carrière, c'est comme un bilan : on ne parle que des choses passées, sur lesquelles on ne peut plus agir. Le présent et l'avenir m'intéressent davantage. Je n'ai pas envie de faire le point, j'aurais l'impression de parler que de choses négatives.

C'est très agréable de jouer dans un film qu'on aime. Pour les acteurs, le moment le plus exaltant de la vie, c'est le moment où l'on tourne. C'est un moment merveilleux. On ne travaille pas vraiment. On ne peut pas dire qu'on travaille.

Je trouve normal de relire le scénario à haute voix avec le metteur en scène, de retravailler les dialogues. Ce qui est écrit, c'est une chose, ce qui peut se dire en est une autre. Je trouve qu'il faut faire confiance à un acteur lorsqu'il estime que la phrase n'est pas juste, qu'il a des difficultés à la faire passer. Bien sûr, les acteurs n'ont pas toujours raison ! Mais il faut faire confiance à leur instinct.

Je suis tranquille, ma carrière est dans d'excellentes mains : les miennes.

Tous les rôles me tentent Je refuse seulement de tenir dans la vie celui d'une vedette, le seul plaisir étant pour moi, à la ville comme à l'écran, de rester naturelle.

Je suis une bagarreuse, comme les gens obstinés, têtus. Je suis fataliste, positive, pessimiste, enthousiaste. Je me protège en évitant les déceptions et pour ce faire, je refuse les rencontres éphémères.

Je sais dans quelle catégorie d'actrices j'entre pour le public, j'en souffre parfois ; être jolie femme, même si c'est agréable, c'est un peu superficiel. Mais je le comprends.

Je choisis un film à tourner par rapport au metteur en scène d'abord, puis au sujet qui est plus important que le rôle qui m'est attribué. Je ne m'identifie jamais aux rôles et aux personnages.

Il y a dans l'étiquette de monstre sacré quelque chose de figé. Une star reste épinglée sur des murs dans l'imagination du public. Moi j'aime circuler.

Je ne crois pas que les critiques soient ceux qui parlent le mieux de cinéma.

On me situe toujours entre "Belle de jour" et "Répulsion", une jeune femme blonde, élégante et ambiguë, à la fois ange et démon. Ce n'est pas que je veuille donner de moi une image différente, car après tout c'est bien agréable si l'on veut être aimée de faire ce qu'on attend de vous. C'est pour mon plaisir personnel. J'aime beaucoup les rôles qui n'ont pas été systématiquement écrits pour moi.

Je veux rester une actrice. Le jour où je n'en aurai plus envie, je deviendrai peut-être productrice. Mais je n'ai pas réussi à concilier les deux. Souvent les acteurs, quand ils ont le contrôle de tout, se trompent Ils finissent par devenir un peu despotes. Pour être acteur, il faut garder une certaine disponibilité, une certaine grâce. Les soucis de production, c'est autre chose.

Je ne veux pas faire de théâtre. J'ai du mal, face à un groupe inconnu. Je m'angoisse. C'est comme les conférences de presse. Je ne peux m'empêcher de voir derrière telle ou telle question une insinuation, une perfidie... qui souvent s'y trouvent. Alors je vois rouge et j'ai droit immanquablement à des articles parlant de la blonde glaciale, de l'enquiquineuse au visage d'ange...

Je voudrais être la seconde meilleure actrice. Ainsi, il me resterait toujours une place à conquérir.

Mes choix sont guidés par les impulsions. Et je choisis plutôt mes metteurs en scène. Mais il est vrai que lorsqu'on vient de faire un film qui a bien marché, on a envie de prendre des risques ; de même que lorsqu'on a travaillé avec un jeune auteur, on aime bien retrouver la sécurité que procure un cinéaste plus chevronné.

Le cinéma devient plus réaliste : maintenant, on a envie de prendre des gens qui ressemblent vraiment aux personnages qu'ils vont interpréter.

Je crois à la notion de couple cinématographique et j'y ai toujours cru. Je fonctionne comme cela, en tant que spectatrice. C'est surtout une question de chimie. Je pense par exemple aux couples formés par Grace Kelly et Cary Grant, Vivian Leigh et Marion Brandon, ou encore Isabelle Adjani et Alain Souchon. Il y a également des acteurs qui ne fonctionnent pas lorsqu'ils sont mis face à face. Pour qu'un couple cinématographique soit réussi, il faut que le public souhaite vous réunir, peu importe si c'est l'espace d'une demi-heure, une heure ou plus. Il faut aussi, quelle que soit l'histoire du film, que les spectateurs désirent vous voir ensemble à la fin.

Je veux choisir des metteurs en scène qui auront la force de stopper une bette scène de désespoir.

Je ne déchaîne pas de passion. Je préfère qu'on m'admire. Hier, les actrices étaient montrées comme des objets de désirs. Aujourd'hui, les femmes ne sont pas moins désirables, mais on les montre autrement. Elles sont plus proches de la réalité.

Le succès crée des habitudes et des envies parfois difficiles.

Le public, je ne le connais pas. Je l'aime et je respecte ses goûts, mais on ne peut pas me demander de chercher à lui plaire. S'il fallait que je fasse des choix en fonction de lui, ce serait impossible. Il faut que l'on m'accepte telle que je suis, je ne ferai aucune concession pour lui plaire. Je me préoccupe de l'opinion publique, mais relativement. Et si quelqu'un déclare "elle est hautaine", je m'en fiche. Les acteurs sont déjà des gens qui se compromettent beaucoup et il ne faut pas trop leur en demander. Faire un métier public est déjà chercher à plaire en quelque sorte.

J'aime que l'on ménage les acteurs, c'est-à-dire qu'un metteur en scène montre ce qui est invisible.

Au début, tout est facile. On marche sur des rails. C'est avec le succès que tout se complique, car il faut savoir se remettre en question, se piéger, surprendre ; sinon, on devient un acteur coté et puis voilà. Moi. j'aime varier et c'est ainsi que j'entends continuer à faire ce métier.

Je souhaite travailler en harmonie avec le metteur en scène. Je n'aime pas les rapports d'antagonisme, les conflits. Il faut que je me sente en confiance. Je n'ai pas très envie de prendre des initiatives. Je veux être tenue par le metteur en scène, entrer dans son monde. Mais, si je sens, au tournage, des faiblesses et des incohérences, alors, je prends mon personnage en main et je m'y tiens. Les acteurs sont les éléments principaux d'un film. Ce sont eux qu'on regarde. Le rôle de la mise en scène est de raconter et de servir une histoire, donc, les acteurs. Une bonne mise en scène ne doit pas se voir, mais se laisser deviner.

On ne peut rien contre l'opinion publique, vraiment rien ! Les gens gardent une image de vous, répercutée par les photos, ou certains échos de la presse. Cette image défie tous les changements d'emploi que vous avez pu tenter.

Avoir un César, c'est mieux que de recevoir une gifle. Non, sérieusement, sur le moment ça fait plaisir, c'est vraiment agréable et cela peut contribuer à l'éventuelle seconde carrière d'un film. Mais j'avoue que ce César n'a pas changé grand-chose pour moi après. Quant au Festival de Cannes, je ne m'y rends pas si je n'ai pas de film à présenter. Je ne suis pas boy-scout, vous savez... Je participe à ce genre de manifestations non pour "défendre" un film, mais parce que ça fait partie de son lancement au même titre que la promotion.

J'aime bien qu'on me laisse faire, mais je suis quand même quelqu'un qui a besoin d'être libre. Je n'aimerais pas quelqu'un qui m'étoufferait, car je serai blessée. Je suis étonnée quand je vois certains metteurs en scène. Je me dis : comment peut-on être metteur en scène si l'on a pas appris avant toute chose à parler aux acteurs.

J'aime beaucoup rire et faire rire ! J'ai interprété beaucoup de rôles dramatiques, mais j'aime beaucoup les personnages de comédie. Tout est plus agréable et l'ambiance du tournage est très particulière lorsque l'on tourne un film léger. J'ai adoré mes personnages dans "La Vie de château" et "Le Sauvage", et j'espère avoir bientôt l'occasion de refaire une vraie comédie... En France, malheureusement le comique reste toujours un peu trop cartésien. Woody Allen a une façon de tourner en dérision l'amour, la mort et le sexe qui me plaît beaucoup.

Je ne sens pas la nécessité de me vieillir au cinéma. Pour quoi faire ? Avant, je ne dis pas, mais maintenant ! Sinon, qu'est-ce que je jouerai dans dix ans ?

J'aime beaucoup parler des films que j'ai faits, mais je déteste parler du travail que cela représente. Je trouve assez indécent de parler de l'effort physique ; c'est comme si un danseur vous parlait des heures de barre qu'il doit faire chaque jour avant de présenter un spectacle. Je trouve qu'il y a beaucoup plus pénible que tourner des films, et la moindre des choses est de présenter ce métier privilégié malgré tout avec un certain bonheur.

J'ai beaucoup de vidéocassettes de mes films, mais je ne les regarde pratiquement Jamais. Je n'aime pas me voir au cinéma. Pourtant, paradoxalement, je vais toujours aux rushes. Ça m'aide à construire mon travail. Là, je me regarde comme je regarderais quelqu'un d'autre : c'est un déroulement authentique. Et puis, je suis toujours satisfaite de moi, sauf peut-être dans "Le Dernier Métro".

J'ai horreur du côté exhibitionniste dans le métier d'acteur et je n'aime pas l'indécence.

Je n'aime au fond que ça, travailler. Quand je ne tourne pas, je me sens vide. Je me balade, je vois des gens, mais j'attends le jour où je pourrai travailler.

Mes rôles nourrissent, mes fantasmes m'enrichissent Ce sont des curiosités assouvies. Ils me permettent de m'épanouir, de rêver d'une façon apaisante. De vivre les vies secrètes que, tous, nous avons envie de vivre. Ils me permettent non pas d'être quelqu'un d'autre mais d'être différente. Si bien que, lorsque j'interprète un rôle, ce n'est pas vraiment un jeu, et ce n'est pas vraiment la vie non plus. C'est une continuité de la vie. Curieuse situation où je me sens à l'aise, bien qu'il y ait des moments où je souffre, parce qu'il y a des choses plus ou moins faciles, ou plus ou moins agréables à faire.

J'ai l'impression, lorsqu'on me pose des questions, que les réponses en fait sont dans mes films, que je n'ai rien à ajouter. Je dois avoir tourné plus de quarante films, vous voyez, je sais tout de même approximativement leur nombre - alors il est impossible, si on les regarde, de ne pas avoir une idée de ce que je suis réellement En tout cas, du point de vue de mon comportement La vérité doit correspondre fatalement à mon profil, non ?...


Editions PAC


Par : Philippe Barbier, Jacques Moreau et Jean-François Josselin

 

Films associés : Belle de jour, Répulsion, Le sauvage, La vie de château, Le dernier métro



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