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La plénitude de Catherine Deneuve

Dans "Le dernier métro", François Truffaut lui a, non pas écrit, mais " offert " un rôle.

Catherine Deneuve, tout sourire dehors. Robe ample taillée en pleine étoffe, le cheveu aussi blond que flou et les yeux pétillants qui n'en finissent pas d'exprimer sa joie. La critique loue tout à la fois le film et sa performance d'actrice et, devant la salle des Champs-Elysées, événement assez rare en semaine un après-midi, il y avait la queue au guichet pour "Le dernier métro" : comment ne pas être comblée ? Bref, une Catherine Deneuve qui n'a rien, mais alors absolument rien, de l'actrice à qui, entre deux distinctions cinématographiques, il a été décerné le très acide et peu envié prix Citron.

Et ce n'est pas entorse à son tempérament. Simplement, il y a des jours où elle est gaie, d'autres où elle est triste ; des jours où elle est affable, d'autres où elle l'est moins. Comme tout le monde, en quelque sorte. Enfin presque. Trop fine pour se justifier, trop orgueilleuse aussi, elle place astucieusement une petite phrase attribuée à Marilyn Monroe : "Quand on est star, on ne peut pas avoir d'âme". Elle précise que pour elle ce n'est quand même pas un état à supporter tous les jours que font les ans, qu'il ne lui est pas imposé d'être : "Tout le temps nue, tout le temps dépouillée", mais "n'empêche qu'il y a des moments ou l'on n'a pas envie d'être disponible pour d'autres que les siens". Et notamment ceux où la presse vous tape sur les doigts, où le public ne vous suit pas aussi loin que vous l'auriez voulu.

Le rose de réchauffement ne lui monte pas aux oreilles, mais aux joues quand elle explique :

Ce n'est pas si simple d'être une actrice. Quand on accepte un rôle, même après avoir lu et relu le scénario ; on n'est nullement certaine de s'investir dans des œuvres, pas plus persuadée que l'on sera à la hauteur de ses ambitions... Les reproches ne m'ont jamais fait sortir de mes gonds ; ce qui m'agace, c'est une certaine mauvaise foi, plutôt un manque de relativité dans la critique. Il y a des échecs que je revendique et pour lesquels j'ai de l'estime. Je veux dire par là qu'il est des films et des rôles beaucoup plus beaux que certaines réussites. Et puis, ce serait bien monotone, la vie... d'artiste, s'il fallait renoncer à tous les risques et n'accepter que des films avec les plus grands.

Avec François Truffaut, c'était presque du cousu main. L'un des trop rares réalisateurs français à ne jamais céder à l'opportunisme, à bâtir une œuvre avec des films personnels :

Depuis "La sirène du Mississipi", je connaissais bien François, dit-elle, nous étions amis et si nous n'avions pas retravaillé ensemble, nous ne nous étions jamais perdus de vue. Me connaissant bien et selon ses habitudes de travail, il a écrit le dialogue en pensant à moi et c'est donc beaucoup plus commode de le jouer ensuite. Il a surtout cette incomparable manière de vous impressionner par son sérieux, sa rigueur, sa passion. Travailler sous sa direction, c'est se sentir investie ! Il sait vous contraindre, vous retenir dans le jeu, vous empêcher de tomber dans un fouillis d'expressions sous prétexte d'émotions à faire passer. La dépendance de l'acteur vis-à-vis du metteur en scène est énorme. Il y a des films où vous avez eu la certitude de tout donner et quand vous les voyez, achevés, il ne se passe rien. C'est ce que j'appelle le mystère, dans la mesure où cela tient à une lumière, à un angle, à une hauteur d'objectif. La preuve, c'est que la même scène tournée par un autre cinéaste peut être parfaitement grotesque et ridicule...

Et la part de l'actrice dans tout cela ?

Rien d'autre que de ne pas se prendre au sérieux sous menace de rester complètement coincée et prendre beaucoup de goût et de plaisir à jouer. Et ce n'est pas si simple ! C'est un métier incompatible avec la vie d'adulte et c'est souvent très dur de garder son insouciance d'adolescent.


Par : Henri Quiqueré
Photos :


Film associé : Le dernier métro

 



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