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"Je suis d'abord une femme pressée"

Sa soif de vivre en a fait à la fois notre Marianne et notre plus belle ambassadrice.

Catherine Deneuve est la Française la plus connue aux Etats-Unis. Et cette adulation ne date pas d'aujourd'hui !

Tout a commencé, me raconte-t-elle, en 1968. Lorsque j'ai fait mon premier film américain, "April's fools", aux côtés de Jack Lemmon. Puis, j'ai tourné en 1970 une publicité, un film pour Chanel, inédit en France. Bref, de hasards en circonstances, je suis devenue, c'est vrai, une sorte de symbole de la France en Amérique. Mais de là à dire que tous les Américains me connaissent, il y a un grand pas que je ne franchirai pas !

Sa blondeur, sa beauté et sa douceur ont donc fait de Catherine la star française numéro un. Mais on aurait tort de se fier à cette douceur apparente car l'héroïne tumultueuse du "Lieu du crime" d'André Téchiné (qui a représenté la France à Cannes) a du caractère à revendre. De l'énergie et de la vie aussi.

Je suis toujours pressée, m'avoue-t-elle. Je crois que je suis la femme qui se maquille le plus vite au monde ! A peine un quart d'heure en tout ! Bien sûr, pour les grandes occasions, pour les galas, je mets un peu plus de temps. Mais jamais plus de trois-quarts d'heure. Autant vous dire que, ces jours-là, je ronge mon frein ! Ça m'embête de passer tant de temps sur moi-même. Pourtant, je sais que cela compte.

Elle le sait d'autant plus qu'elle n'est pas le genre de femme qui sortira sans maquillage ! Il aura fallu qu'André Téchiné s'en mêle pour qu'elle accepte d'apparaître sur grand écran en femme simple, tenancière d'un dancing à la campagne : cheveux trempés et gilet blafard. Mais Catherine se sent en confiance, à juste titre, sous la direction d'André Téchiné avec qui elle a déjà tourné le très bel "Hôtel des Amériques". Ce réalisateur-là la voit d'un autre œil et elle aime ce regard porté sur elle.

N'empêche que c'est sûrement son aspect lisse, diaphane, soigné à l'extrême et son teint de pêche blanche qui ont séduit les Américains. Jusqu'au président Reagan qui a craqué ! Pour ses soixante-quinze ans, elle lui a offert, en divine ambassadrice de la France, une relique en cristal de la statue de la Liberté. Et puis, comme chacun le sait maintenant, Marianne est entrée dans la vie de Catherine. Désormais, Deneuve va représenter la République dans les mairies de l'hexagone car c'est elle que les Français ont désignée d'un seul chœur pour être la nouvelle Marianne.

Comme si toutes ces actions ne lui suffisaient pas, Catherine Deneuve s'est trouvé d'autres passions pour alimenter ses jours. Car on peut tout à la fois avoir la tête bien faite, bien pleine et garder un sens pratique aigu. Après avoir dessiné une ligne de bijoux, Catherine, à la demande des Américains, a créé un parfum baptisé - tout simplement - Deneuve. Diffusé par Phénix, ce parfum (bien que fabriqué en France) est pour le moment introuvable chez nous. On ne le voit pas davantage dans les magasins outre-Atlantique car il ne se vend que par correspondance ou par téléphone (336 38 83... vérifiez sur vos combinés, vous verrez : ce chiffre correspond exactement aux lettres D.E.N.E.U.V.E.).

C'est un parfum à surprise, un parfum qui se développe au fur et à mesure que passe le temps. C'est un parfum qui bouge.

On a envie d'ajouter : comme elle. Car elle bouge tout le temps, cette femme de cinéma qui se double d'une femme d'affaires redoutable. Ce qui ne l'empêche pas d'avoir encore une autre activité, et qui prime toutes les autres : celle de mère de famille.

Quand on est mère, c'est pour toujours, me confie-t-elle. On s'occupe éternellement de ses enfants. Les miens, je les ai voulus. Très jeune, j'avais un besoin, une envie d'enfant absolument incroyable ! Quelquefois il m'arrive de regretter d'avoir eu mon fils si tôt ! D'abord parce que je crois que je n'ai pas été une bonne mère lorsque j'étais très jeune, en tous cas pas la mère que j'aurais aimé être. Et ensuite parce qu'il y a une époque de ma vie que je n'ai pas connue : celle entre l'adolescence et la maternité.

Elle poursuit :

II y a des moments où j'ai envie de casser cette image de perfection qu'on m'accole trop souvent. La femme parfaite, idéalisée ! J'ai envie de faire des pieds de nez. Je crois que cette année, c'est l'apothéose : Marianne, le parfum... Heureusement que derrière cette façade léchée transmise par les magazines, je suis toujours moi !

Moi, c'est-à-dire une femme vivante, passionnée, rieuse, maternelle, amoureuse... Une femme attentive qui se préoccupe de l'avenir de ses enfants : Christian, 22 ans et Chiara, 14 ans. Christian a choisi sa vie : il est comédien.

J'espère qu'il va avoir de beaux rôles, dit Catherine qui fait contre mauvais fortune bon cœur, car elle ne souhaitait pas que son fils suive cette filière familiale. C'est un beau caractère, très solaire. Mais je ne change pas d'avis : j'aurais préféré qu'il fasse autre chose. En fait, je ne lui en veux pas. J'en veux à son père qui l'a poussé là. Christian voulait devenir assistant. J'aurais été moins inquiète à le savoir de l'autre côté de la caméra.

De Chiara elle préfère ne pas trop parler. Car la fille qu'elle a eu avec Marcello Mastroianni lit les journaux et Catherine ne veut pas l'indisposer par ses déclarations, de même qu'elle se fait très discrète lorsqu'elle va la chercher à l'école.

Ce n'est pas facile d'être la fille ou le fils d'une personne publique. A quatorze ans, Chiara, comme toutes les filles, est bien plus mûre qu'un garçon de vingt-deux ! L'adolescence dure longtemps chez les garçons.

Si elle ne peut se passer de jouer, Deneuve a réussi à renoncer aux cigarettes.

Et ça, c'est du vrai courage ! Je fumais trois paquets par jour ! S'arrêter brusquement frôle l'héroïsme. Du coup, j'ai énormément grossi. Heureusement, aujourd'hui, j'ai tout reperdu.

Comment ? Elle ne le dit pas. Mais quand on connaît son appétit (aussi grand que sa joie de vivre et son besoin de s'amuser), cela a dû, en effet, être très dur. Pourtant chez Deneuve les efforts de volonté ne se voient pas. C'est là qu'est son génie. Elle ne donne ni leçons de maintien, ni cours de gymnastique, ni conseils de beauté. Elle est elle-même, éclatante, sereine, discrète par dessus tout. L'exemple même de la femme bien dans sa peau.

Je ne veux renoncer à rien, dit-elle. J'ai tendance à abuser de tout. Je me couche souvent trop tard. Comme j'ai une santé de fer, je tire sur la corde. Mais j'ai besoin de vivre pour pouvoir jouer. Le cinéma ne remplace pas la vie, il se nourrit d'elle.

Alors, on a envie de lui demander comment tout cela a commencé, comment Catherine est devenue Deneuve. Enfant, elle était plutôt timide, réservée, et elle n'avait qu'une seule amie, sa sœur Françoise Dorléac. Lorsque celle-ci choisit de devenir actrice, elle entraîna dans sa foulée sa cadette. Elle disparut trop tôt dans un tragide accident de voiture, en 1967. Par discrétion et sans doute parce que le nom sonnait bien, Catherine adopta le patronyme de sa mère : Deneuve. Elle ne vit son père jouer qu'une seule fois. En fut-elle marquée ? Sans doute puisque, dès le lycée, elle commença à jouer des petits rôles dans des films. Mais elle semblait à cette époque plus intéressée par la décoration que par la comédie.

Ce goût des beaux intérieurs lui est resté. Son appartement actuel, non plus dans le seizième mais dans le sixième arrondissement, est très chic, très classique, tout en ayant une touche très personnelle. Pas de désordre. Rien ne traîne. Des belles fleurs, toujours fraîches, dans de beaux vases. Pour Deneuve, visiblement, la vie est un art. Elle en est la prêtresse. Et l'argent qu'elle gagne en faisant son métier lui permet de vivre comme elle le désire, avec luxe, calme et volupté. Pourtant elle refuse cette idée.

Les comédiens ne jouent pas pour l'argent mais parce qu'ils aiment ça. Quand, toute jeune, j'ai quitté ma famille pour devenir actrice, je ne pensais pas à l'argent. J'étais contente, c'est tout. Ça n'a pas changé.

Après "Le lieu du crime" d'André Téchiné, Catherine Deneuve a tourné "Pourvu que ce soit une fille", un très joli film de l'Italien Mario Monicelli. Elle est donc deux fois à l'affiche en ce moment et sa soif de jouer est satisfaite. Elle peut se laisser aller à ses autres joies. Multiple et inchangée, telle qu'en elle-même. Car c'est le miracle de cette femme : rester toujours intacte. Sa recette ? La daube au vin rouge ou le lapin aux morilles. Vous l'avez compris, le vrai truc de Catherine Deneuve, c'est de bien vivre.


Ce que j'aimerais jouer

J'aurais adoré jouer Evita Peron. J'ai été fascinée par une bande d'actualités où l'on voyait à la fois le côté mythique du personnage, adulé par une foule immense, et le côté sordide d'une destinée de chanteuse parvenue. Mais il y a aussi Catherine de Russie : elle était en avance sur son temps et avait un sacré caractère.

Son premier livre lu

Ce doit être un ouvrage de la comtesse de Ségur. Mais, avant cela, j'ai lu de nombreuses bandes dessinées : "King, le roi de la police montée", "Mandrake, le magicien" qui ressemblait beaucoup à mon père. Je crois que je lisais bien moins que mes enfants ne lisent aujourd'hui. Je passais bien plus de temps à jouer avec mes deux sœurs.

L'Afrique verte

Le plus beau cadeau qu'on puisse faire à l'Afrique, c'est la rendre capable de se passer de nous, dit Catherine Deneuve qui s'engage dans une campagne pour aider les Sahéliens. Elle vient d'accepter de prêter son nom pour déclencher l'intérêt sur une campagne que mènent conjointement Terre des hommes, Frères des hommes et Peuples solidaires. Je refuse de n'être qu'une tête d'affiche : je veux travailler avec ces organisations dans la mesure de mes forces et de mon temps libre.

"J'ai tendance à abuser de tout"


Par : Monique Vassal
Photos :


Films associés : Le lieu du crime, Hôtel des Amériques, Folies d'avril, Pourvu que ce soit une fille



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