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Ses interviews / Presse 1990-99 / Femme 1991 |
Repères
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Cela fait longtemps que vous
êtes considérée comme la plus belle femme du monde.
Qu'est-ce que ça vous fait ? Qu'est-ce que vous aimez le
plus en vous ? Et moralement, quelle est la
qualité dont vous êtes la plus fière ? Vous êtes perfectionniste
dans le travail ou dans la vie ? Comment cela se traduit-il ? Je serais vous, franchement,
je crois que je pourrais me contenter de moi-même. Vous changez tout le temps d'appartement,
par exemple ? Vous vous couchez tard ? A quelle heure le réveil
? Vous dormez donc six heures
par nuit. C'est assez ? Qu'est-ce que vous n'aimez pas
chez vous, maintenant ? Votre bouche ? Pourquoi ? ...Un objet à vendre
? Votre plus gros défaut
? Pour un film ? Pour un homme
? Vous gambergez beaucoup ? Y a-t-il un moment que vous
réservez à la méditation ? Vous priez ? Vous ne croyez pas en Dieu ? Voilà toute l'ambivalence
deneuvienne. Contrairement à tant d'actrices comme Sophia Loren,
Michèle Morgan ou Béatrice Dalle, vous incarnez toujours
une chose et son contraire. Vous avez un modèle de
femme ? Vous êtes moins fragile
? Le cardinal de Retz a dit qu'on
ne sort de l'ambiguïté qu'à son propre détriment.
Vous en sortez rarement, finalement ? Quand on se dévoile,
on perd vraiment de soi ? Vous ne regardez donc pas beaucoup
vos photos ? Mais vous ne pouvez pas échapper
totalement à votre destin de star. J'imagine que vous vous regardez
souvent dans la glace... Vous suivez l'actualité
? Politiquement, on ne sait pas
bien où vous êtes. Vous vous situez quelque part ? Et si les acteurs disent ce
qu'ils pensent ? Vous ne faites jamais ce genre
d'émissions ? Quel genre de questions n'aimez-vous
pas que l'on vous pose ?
En 1965, pour mon premier film, "La vie de château", je cherchais une comédienne vive et rapide. J'avais pensé à Françoise Dorléac, alors plus connue que sa sur Catherine Deneuve. Hélas, très fantasque, elle ne venait pas à mes rendez-vous. Ça m'a agacé. A la sortie des "Parapluies de Cherbourg", ma productrice m'a suggéré Catherine. Je n'étais pas emballé car je me demandais si cette femme que l'on disait calme et sage pourrait jouer ma comédie. Bien m'en prit de m'entêter car Catherine fut extraordinaire. A tel point que dix ans plus tard quand j'ai voulu faire un film trépidant, "Le sauvage", j'ai immédiatement pensé à elle. Dans ces deux histoires, elle fut une vraie tornade, possédant un éclat et une beauté inouïs. Car elle est tout le contraire de la femme placide qu'on imagine. En elle se cache un turbo. A tel point que dans les poursuites du "Sauvage", elle courait si vite que Montand ne pouvait pas la rattraper. S'il fallait la définir, je dirais qu'elle correspond à l'image idéalisée que j'ai de l'héroïne française. Elle pourrait jouer des héroïnes de Balzac, Stendhal, Proust et Giraudoux, sans problème. Elle est la star blonde française comme Isabelle Adjani est la star brune. Je caresse même le rêve de les faire tourner dans le même film. Mais met-on deux crocodiles dans le même marigot ? ROMAN POLANSKI : "UNE FEMME PUDIQUE" Je ne me souviens plus de ma première rencontre avec Catherine. Ce devait être en 1960, au temps où elle vivait avec Vadim, pendant le tournage des "Parapluies de Cherbourg". Par la suite, je l'ai revue à Paris. Nous nous aimions beaucoup. Quand m'est venue l'idée de "Répulsion", j'ai songé à elle. Sa personnalité, sa beauté, et sa façon de jouer me plaisaient. Disons-le, j'étais déjà un de ses admirateurs. Travailler avec elle fut une rencontre dont je me souviens avec nostalgie. Elle s'est mise entre mes mains, attendant chaque jour mes suggestions, me regardant comme un élève regarde un professeur en qui il a confiance. Notre seul différend eut lieu au cours d'une scène déshabillée. Elle portait, sous une chemise de nuit transparente, une culotte que je voulais qu'elle retire par souci de vérité. Elle était très gênée car c'était la première fois que cette femme pudique se dévoilait. Ce n'est pas à moi de dire si "Répulsion" fut un tournant de sa carrière, mais on l'a dit. Quant à son image d'actrice glacée, je crois qu'il s'agit chez elle d'une apparence, d'une protection. J'aimerais retravailler avec Catherine même si faire un film avec un acteur qu'on connaît est difficile. JEAN-PIERRE MOCKY : "UNE
FEMME SIMPLE" Jusqu'à " Agent trouble ", en 1986, je n'avais jamais travaillé avec Catherine Deneuve. Je trouvais qu'elle avait trop cette image de mannequin intelligent symbolisant la Parisienne, image qu'on voit sur les couvertures des magazines comme "Femme". De son côté, Catherine refusait les contre-emplois. Elle avait même repoussé le rôle de Jeanne Moreau dans Le Miraculé - une ancienne pute rousse qui fait des gâteries à Michel Serrault - que je lui proposais. Pour "Agent trouble", qui était une histoire à la Hitchcock, elle changea d'avis. Ne voulant pas qu'elle apparaisse comme un double de Grace Kelly, je l'ai transformée en vieille fille à lunettes, mal habillée et sexuellement bloquée. Pourquoi a-t-elle accepté ? Parce qu'elle veut changer d'emploi, parce qu'elle tient à prouver qu'elle peut jouer n'importe quoi. D'autant qu'en privé, Catherine Deneuve est loin de ressembler à son image d'actrice glacée : mère célibataire, libre, franche, dénuée d'hypocrisie, pleine d'humour, elle s'assume, ne fait jamais de caprices et n'a rien de la star qui se pomponne des heures durant. C'est une femme simple qui ne se nourrit pas que de pamplemousses mais mange de la tête de veau et boit de la bière. La preuve qu'elle change, c'est que nous tournerons de nouveau ensemble, l'année prochaine, avec Jack Nicholson. Elle interprétera une femme tondue à la Libération, portant un monocle et habillée comme Marlène Dietrich dans "L'ange bleu". |
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