Ce qui est frappant,
quand on rencontre Catherine Deneuve, ce n'est pas que l'image qu'on
a d'elle soit fausse : elle ne l'est pas. Mademoiselle Deneuve est,
comme prévu, belle, séduisante, élégante.
Mais c'est que cette image soit si simplificatrice, si incomplète,
en un mot, si réductrice. En fait, l'image a exclu l'essentiel
: Catherine Deneuve est une comédienne et, donc, une femme
inattendue, imprévisible. Quand elle dit que les acteurs
ont un droit à l'insouciance, on réalise soudain qu'on
a devant soi quelqu'un dont on ne sait rien. Et, au fur et à
mesure de la conversation, on fait la connaissance d'une femme vivante,
vibrante, faite de contradictions et non de certitudes. Une femme
"normale", dotée d'un grand capital charme, qui,
en plus, s'avère être l'incarnation d'un symbole, sûrement
difficile à porter : "la Française idéale".
Lourde couronne, qui lui va à ravir, mais qui tend à
vampiriser tout le reste... De sa carrière, de sa place dans
la profession, de son métier, de son année, Catherine
Deneuve parle avec intelligence, humour, posément, mais pas
indifféremment. Et puis, soudain, au détour d'une
phrase, elle dit trouver certains rôles qu'on lui offre trop
sages, trop adultes, et là, soudain, on trouve enfin l'adjectif
qu'on cherchait en vain depuis une heure pour la définir
un peu moins mal : ce qui fait, dans la vie, le charme de Catherine
Deneuve, c'est un trait de caractère imprévu, enfantin,
qui, appliqué à "l'image" qu'on a d'elle,
la rend terriblement sympathique : Catherine Deneuve est une femme
déraisonnable...
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