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"Encore belle"

Ce mot "encore belle"
je l'entends effectivement souvent, sans qu'il me paraisse injuste.
On sent bien à travers lui que les gens pensent que je vais
vers le bord "d'autre chose", vers le coucher de soleil,
vers l'aube, ce qu'il faut accepter, on ne peut pas s'en extraire. |
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Il n'y a qu'une idée
qui me paraît importante aujourd'hui et que je voudrais faire
passer dans les interviews : ne croyez pas que je ne sais pas. Je
sais, je vois, je me vois, je sais l'âge que j'ai, je suis présente,
je suis lucide, je ne vis pas dans une tour d'ivoire, je me connais,
je connais mon statut d'actrice, je ne suis pas sure que je saurai
vivre toutes les situations qui m'attendent, je ne sais pas comment
j'envisagerai ma vie dans quelques années, je sais tout ce
qu'il y a de magnifique derrière moi, je sais à peu
près ce qui reste devant moi, tout en espérant encore
être surprise car j'ignore ce que je ferai dans cinq ou dix
ans ou vers quoi je vais évoluer. Voilà. |
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C'est très difficile
de vieillir. Pour une femme, c'est déjà difficile de
vieillir dans la vie, mais pour une actrice, c'est effrayant de vieillir
au cinéma. Après tout, je me dis qu'on a le droit de
refuser les évidences, le racisme lié à l'âge
et les idées toutes faites que la société tente
de nous imposer. Ce qui me guide, dans le choix de mes rôles,
c'est de rester en harmonie avec ce que je ressens. |
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[à propos des
marques du temps]
Je ne refuse pas d'en parler mais c'est quelque chose de très
intime, avec lequel on essaie de vivre. J'essaie de me mentir le moins
possible, mais je sais que je peux mentir aux autres. Je sais qu'il
y a des jours où je n'arrive pas à jouer complètement
le jeu de ce que je devrais être, parce qu'il y a des moments
dans la vie où on lutte encore et où on essaie encore.
On a beau dire qu'on le sait, il n'empêche que c'est difficile
de l'accepter. On résiste. Il y a des moments où l'on
se sent beaucoup plus fort et où l'on se dit qu'il faut quand
même bien accepter, que ce n'est pas si grave. Et c'est vrai
qu'il y a des jours où ce n'est pas si grave, où l'on
se sent soudain très léger en se disant que l'on peut
aller vers ça. [...] Ce qui est terrible et cruel, c'est qu'on
vieillit physiquement mais pas dans sa tête, ou très
peu. On change mais on ne vieillit pas beaucoup, on a donc du mal
à accepter parfois d'être devenu cette personne que l'on
connaît, c'est vrai, alors qu'on ne se voit pas soi-même
comme ça. |
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C'est une chose très
difficile avec laquelle j'essaie de vivre le mieux possible. C'est
un des grands problèmes des actrices, à un moment de
leur vie. Une chose à laquelle on ne peut pas échapper,
avec laquelle il faut vivre, et contre laquelle on ne cesse de lutter.
Toutes les femmes qui disent que ce n'est pas un problème sont
des menteuses. C'est encore plus douloureux pour les actrices, et
ça l'est aussi pour les hommes. Le cinéma reste avant
tout une chose visuelle. [...] Il faut bien reconnaître qu'à
un moment, les rôles sont quand même beaucoup moins intéressants
pour les actrices que pour les acteurs. Curieusement, on attribue
l'âge de maturité à un homme vers la cinquantaine,
ce qui est synonyme de complexité, de richesse du personnage.
Alors que pour les femmes, il y a toujours cette idée de séduction.
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J'y pense parce que la
réalité se rappelle plus souvent à moi qu'il
y a dix ans. Mais j'essaie de garder une sorte de cohérence,
à mes yeux en tous les cas. C'est vrai qu'il m'est arrivé
de refuser des rôles en disant que ce n'était pas raisonnable,
que je n'avais pas l'âge du rôle. Il y a quinze ans, ça
ne m'arrivait pas, mais ça m'est arrivé. Et j'espère
que je garderai cette vigilance-là. Mais ce n'est pas si facile.
Une fois qu'on a pris cette décision, on se sent supérieur,
avec l'impression d'avoir dépasser le problème. Mais
c'est toujours ambigu. On le fait, mais c'est quand même douloureux. |
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Ce qui m'importe avant
tout, c'est d'être en harmonie avec mon âge mental, physique,
et je ne ferais aucun effort démesuré pour courir après
la gloire. |
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Le danger d'être
statufiée

Je suis en danger. En
grand danger d'être statufiée, de devenir une institution.
[Rires...] Vous connaissez les clichés qui me collent à
la peau "glaciale, distante, le feu sous la glace, taratati,
taratata". C'est vrai qu'à travers les médias j'ai
contribué à forger cette image de moi. J'en suis consciente.
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J'ai un peu peur de me
faire enfermer dans ce statut d'autant plus sournois qu'il est très
confortable et facilite beaucoup de choses : être quelqu'un
de reconnu, qu'on ne remet plus du tout en cause. |
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Je crois que je suis maintenant
un peu hors norme, comme quelqu'un qui a survécu à tout,
on ne sait pourquoi. Si bien que des cinéastes qui n'auraient
pas eu envie de tourner avec moi il y a trente ans [...] peuvent en
avoir l'idée maintenant, mais seulement maintenant... Je suis
aujourd'hui une sorte de puzzle où chacun peut voir ou projeter
quelque chose de différent. J'ai traversé plusieurs
périodes du cinéma français. |
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Il y a un cliché
que je ne supporte pas à mon sujet, c'est "la grande dame
du cinéma français". Tout ça pour en arriver
là ! Je ne veux pas être une dame, encore moins une grande. |
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L'évolution
de la vie

On se trompe toujours
sur la vie des gens célèbres. Les livres, les journaux
ont tendance à romancer la vie des stars, à supprimer
les aspects dérangeants ou les erreurs. |
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Il n'y aurait pas de bonheur,
s'il n'y avait pas de regrets. Si c'était à refaire,
je referais sans doute le même parcours. Bien sûr, j'ai
des regrets. Comment ne pas en avoir ? Mais la vie, c'est aussi ça. |
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Je n'ai pas d'impatience
mais je suis plus disponible depuis quelques années. Je ne
suis pas "débarrassée" de mes enfants - on
ne l'est jamais - mais je n'ai plus les contraintes matérielles
de la vie avec eux. A regrets parfois. Mais je rêve à
présent d'un repos bien mérité. Il me reste cette
notion que les vacances sont là pour équilibrer des
périodes de travail intense. Elles en sont d'autant plus grisantes. |
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Personnellement, j'irais sans doute mieux si je
tournais un petit peu moins. C'est une exposition maximale et je ne
m'en rends compte que quarante ans plus tard, après tous ces
films. Je vis en cinéma. Certains jours, dans ce pays-là,
je peux m'ennuyer ou carrément faire la gueule. Après,
l'activité reprend. Quant aux éloges... Très
tôt, je me suis protégée des compliments, j'ai
plus de mal avec les vacheries. C'est une question de caractère.
Ça me détruit à un point que vous ne pouvez pas
imaginer. Parce que c'est toujours à côté, on
attaque la personne privée, le physique. C'est pas parce qu'on
s'expose qu'on doit être lapidé. |
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Je ne sais pas si c'est
dû à la sophistication croissante des communications,
mais j'ai l'impression autour de moi que tout s'accélère,
que le temps se rétrécit et que l'impatience augmente.
Il faut lire un scénario en deux jours, prendre sa décision
en deux heures, changer d'avis en cinq minutes. Quand on est happé
par cette spirale-là, forcément on en fait trop. |
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Pour plus d'informations sur les activités
des années 1999-2005, voir les pages "Sorties"
et la page "Actualité".

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Depuis 1999, Catherine semble prise d'une boulimie
de cinéma dont on ne se plaindra pas... Elle enchaîne premiers
et seconds rôles, films d'auteur et films grand public, et accepte
même de tourner pour la télévision ! Dans la presse,
tout en préservant toujours le mystère sur sa vie privée,
elle se livre de plus en plus sur des sujets néanmoins très
personnels. Les journalistes l'interrogent avec perfidie sur le "vieillissement",
mais sa beauté, son éclat et son rayonnement demeurent
intacts.
Sorti en 1998, le film "Place
Vendôme" qui lui a valu le Prix d'Interprétation
à Venise,
lui permet d'obtenir sa neuvième nomination aux Césars
(1999).

En 1999, Catherine Deneuve joue dans cinq films
à l'affiche, allant de la comédie grand public ("Belle-maman")
au film d'auteur intimiste ("Le
vent de la nuit", présenté au Festival
de Venise 1999), de la fresque épique sur le régime
soviétique ("Est-ouest")
à la redécouverte de Proust ("Le
temps retrouvé"), en passant par l'OVNI "Pola
X". Elle présente ces deux derniers films au Festival
de Cannes en 1999.
Pour Lars Von Trier, elle incarne une ouvrière
dans le sublime (et très controversé) mélodrame
"Dancer in the Dark", qui obtient la Palme d'Or au Festival
de Cannes (2000).

Son engagement
contre la peine de mort se matérialise à plusieurs
occasions, notamment en remettant solennellement à l'ambassade
des Etats-Unis une pétition.
Mort de Roger
Vadim (2000).
Catherine Deneuve vante les mérites d'un
shampooing au régénium pour L'Oréal
(2001).

Catherine Deneuve chante en direct "Ma plus
belle histoire d'amour c'est vous" en hommage
à Yves Saint Laurent, à l'occasion de ses adieux à
la haute couture (2002).

L'ensemble des actrices de "Huit
femmes" obtient un prix pour la meilleure contribution artistique
au Festival
de Berlin (2002).

En avril 2002, elle tourne une adaptation
des "Liaisons dangereuses" pour la télévision
avec Josée Dayan.

Après "Au plus près
du paradis" fin 2002 et "Les temps qui changent" fin
2004, de beaux films qui connaissent un échec injustifié,
Catherine Deneuve renoue fin 2005 avec le succès avec une comédie
très réussie, "Palais Royal". Mais son meilleur
rôle de ces dernières années est probablement celui
de Marie Bonaparte dans "Princesse Marie", diffusé
sur Arte.

Le Festival de Cannes lui rend hommage
en 2005 en lui décernant une Palme d'Or d'honneur lors de sa
Leçon d'Actrice.

Ses projets sont nombreux, variés, et excitants,
et l'on dirait qu'elle n'a jamais été aussi active, dynamique
et enthousiaste. Souhaitons-lui de continuer longtemps ainsi !
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